Quand on est paramed comme moi, on a des tas d'Adorables Chefs (AC). On a le AC direct, paramed comme nous, du même métier que nous si on a de la chance; les AC au-dessus de lui... et il existe aussi les Adorables Chefs Médecins (ACM).Eux, ce sont les grands manitoux, ceux qui savent, ceux qui ont le sésame de la signature sur l'ordonnance, qui nous permettra de continuer la rééducation. Dans cette catégorie, il y a les grands ACM,les médecins-chefs, et les ACM apprentis, les médecins-assistants.

On m'a toujours expliqué quand j'étais étudiante que les ACM étaient certes adorables, mais que ceux qui s'occupaient du patient c'était nous, et notre rôle était d'expliquer à l'ACM ce qu'on fait, que c'est bien (En accompagnant ça d'un joli rapport, avec des courbes, des chiffres, qui montrent que le patient progresse.) , et que ca serait gentil de faire une pite signature là, en mettant une croix ici, une autre là, et un ch'tit coup de tampon par ici.

Actuellement, je travaille principalement avec deux ACM. L'un d'eux est une hermine, fière d'être arrivée où elle est, parce qu' à son époque les hermines n'étaient pas souvent ACM. Mais Hermine me pose de plus en plus de questionnements: je me demande si les cours de communication, d'annonce de diagnostic, de collaboration existaient quand elle était étudiante. Je suis mal à l'aise à chaque fois qu'elle s'adresse à un patient, la tête remplie de préjugés parce que le patient boit/ fume/ a trompé sa femme/ n'est pas un personnage publique. 

De plus, on m'a toujours appris que l'ACM prend la décision finale, en collégialité avec les paramed, et en accord le plus souvent possible avec le patient. Avec Hermine, la décision finale est prise par ACM, et si les paramed sont d'accord, tant mieux. Si ils ne sont pas d'accord, cela ne change rien. De même, l'avis du patient n'est pas demandé, même si il ne boit pas/ ne fume pas/ ne trompe pas sa femme/ est un personnage important.

Quand l'avenir des gens est en jeu: rentrer vivre à domicile, ou aller en maison de retraite;quand le moral des patient est abîmé par les visites médiales; quand je me rends compte que je ne vais même plus donner mes arguments parce que cela ne changera strictement rien, je me dis que je passe à côté de quelque chose.

Où se situe la limite entre une situation normale avec un ACM acariâtre, mais qui agit correctement, et quelqu'un qui fait de la malveillance? Comment changer le cours des choses, quand la situation est connue mais acceptée par tous?